Objectif suprême. Il faudrait donc que nous devenions libres de nous exprimer professionnellement, de réaliser les projets dont nous rêvons. Compte tenu du système que nous avons précédemment évoqué, il est clair que « la société des compétences » mise en objectif, ne peut être qu’une approche résolument systémique. Un système de responsabilités. Un système d’actions partagées. Il convient de tirer pleinement les conséquences de l’idée fondamentale de co-construction et de co-responsabilité. L’humain est un être social. Il ne sera jamais « libre » sans l’autre, sans les autres. Il est « tous ceux » qu’il a rencontrés, imaginés, affrontés, aimés. Aidé par les autres, mais contraint également. La co-construction est une réalité. La personne apporte son « potentiel », fruit de son expérience, l’entreprise le met en compétences, en performance située. Le système de formation aide la personne à développer son potentiel, son engagement, Le système de formation professionnelle aide l’entreprise à la mettre en compétences, dans la situation d’emploi, dans la situation de travail, voire dans la situation de projet de création d’activité. Personne ne peut être « libre », professionnellement, de réaliser ses projets. Au sens « individuellement libre et seul responsable ». De la même façon, nous ne sommes pas libres et seuls responsables de notre « employabilité », qui, de plus, n’est qu’une probabilité. Nous avons besoin des autres. Nous dépendants des autres et du système auquel nous sommes liés. Nous avons besoin qu’une entreprise, qu’un financeur, que des collègues nous fassent confiance. Personne n’est embauché parce qu’il est formé. Le « self made man » est un mythe ou un leurre, selon l’intention. L’emploi dépend principalement des stratégies d’emploi, des conceptions du travail et de la formation, et des pratiques de recrutement des employeurs, eux-mêmes dépendants de l’activité économique ou de budgets. Face aux adversités, aux contraintes, l’humain, précisément homo sapiens, a réussi par la coopération, non par l’individualisation. L’adage, base d’une pensée dominante : « si je veux, je peux » est faux. Notre réalité d’humain est : « si je peux, je veux. » Mais s’il s’agit de parler de « liberté » au sens de « capabilité de développer son potentiel, de saisir des opportunités, voire de les déclencher, d’être aidé, selon les situations, pour se mettre en compétence face aux situations d’activité rencontrées » alors oui, mais disons « capabilité », pas « liberté ». Nous ne pouvons laisser se dire qu’une personne doit « avoir des compétences » a priori, qui seules peuvent lui permettre de trouver un emploi. Par exemple, cela se vérifie particulièrement pour une personne en situation de handicap. Elle sera rarement jugée « a priori compétente », comme chacun, mais en pire, donc s’il n’y a pas, en premier, un choix par un employeur de recruter, de reconnaitre et de faire confiance à un potentiel, une envie, puis l’intégration par une « mise en compétence », par accompagnement en situations de travail, tutorat, formations spécifiques, et compensation selon besoin, la personne n’a aucune chance. Et l’on continuera à dire que si le chômage ne baisse pas, c’est que les « gens ne sont pas compétents », les entreprises ne trouvent pas les « compétences dont elles ont besoin », aux individus d’être « employables » donc « compétents » …. De belles frustrations et déceptions en perspective. Société de compétences ? Société de connaissances et de reconnaissance ! L’entreprise et l’individu dans le même système. Un système de responsabilités partagées. L’un recrute et mets en compétence, celles dont il dit avoir, lui, besoin. L’autre construit son potentiel et son envie, manifeste et met en œuvre son engagement.
Cyb