Le Graal. Coté entreprise. Il suffirait de les révéler, les faire s’exprimer, les formuler (voire les reformuler), les transmettre, les normaliser pour pouvoir les utiliser. Des récolteurs de besoins feraient le tour, viendraient ramasser les copies… les mettre dans des outils numériques… et tout adapter à leur satisfaction, comme une belle mécanique.

Sauf qu’un besoin n’existe pas a priori. Ce n’est pas un objet existant (JM Barbier, 2011). Ce n’est pas une fleur à cueillir, à prendre en photo, à étudier. Le besoin est un énoncé, résultat d’une construction, quelque fois individuelle, souvent collective entre l’état d’une situation présente, analysée et traduite, et l’état désiré de la situation, autrement dit un objectif fixé. S’en déduit un écart plus ou moins conscient, plus ou moins défini, plus ou moins partagé, qui s’énoncera comme un manque, un besoin de …. La réponse apportée pourra s’appeler stratégie, action ou objet. Cela signifie que l’entreprise ne peut être qu’au centre, oui, et en continu. Les « besoins construits » du moment appellent des réponses dans la temporalité vécue par l’entreprise. Mais ces « besoins » ne sont qu’une traduction, ou un paravent, des objectifs de l’entreprise donc de son management. Ils ne vont pas de soi. Ils ne sont pas forcément rationnels, ni perdurants. La réponse en termes d’objectifs à la situation présente de l’entreprise est un choix, non un objet « naturel ». Ainsi les « besoins » en réponse à un marché obtenu par une entreprise X varient selon les objectifs, et valeurs, de ses dirigeants. S’ils choisissent de créer des emplois, ils recrutent. S’ils souhaitent maintenir le nombre d’emplois, ils changent les affectations de collaborateurs en reportant certaines activités, et « forment » aux compétences nécessaires en situation réelle de travail ces salariés, par accompagnement. S’ils souhaitent diminuer le nombre d’emplois, ils investissent dans des matériels, des robots, de l’IA (Intelligence (?) artificielle) et « forment » aux nouvelles qualifications nécessaires des salariés en poste. Il n’y a là aucun jugement de valeur sur ces choix. Ils en ont le droit, et dans certains cas le devoir. Il s’agit seulement de dire les responsabilités de chacun.

Les « besoins », souvent non anticipables, peu explicités et formalisés, ne peuvent être gérés que par l’entreprise, pour avoir la réactivité nécessaire. Il s’agit de type de formations « internes » et d’organisation apprenante au plus proche des situations de travail réel, au sein même d’une activité de production…. Les « besoins » éventuellement anticipables peuvent être co-construit, par explicitation des objectifs et des diagnostics de situation, avec les entreprises et réalisables par un système de formation professionnelle « externe ».

Les « besoins » renvoient, en fait, aux objectifs à expliciter, à la situation à diagnostiquer, aux choix à anticiper. Devant les manques ou absences des entreprises sur ces trois activités (compétences ?), on s’en remet au langage flou et déclaratif de « besoin ».

Il s’agit de mettre l’entreprise au centre, nous sommes bien d’accord… et au centre de ses responsabilités. Loin de l’accuser inutilement, ou de la vénérer aveuglement, il s’agit de l’aider sur ces trois activités… pour, avec elle, dire ce que l’on va retenir comme « besoin ».

Cyb